La Banque de France : un colosse aux pieds d’argile ?

La Banque de France, c’est l’institution qu’on nous vend comme un roc inamovible. Le gardien de notre stabilité financière, chargé de superviser les banques, de gérer les crises de surendettement et de veiller à l’équilibre monétaire. Pourtant, en 2024, elle affiche une perte nette de 7,7 milliards d’euros, après un déficit de 12,4 milliards en 2023. Pour limiter la casse, elle a puisé 10,1 milliards dans ses réserves, désormais à leur plus bas niveau depuis 2012. Des chiffres qui font tourner la tête et qui ont déclenché une vague de rumeurs alarmistes sur les réseaux sociaux, certains allant jusqu’à crier à la « faillite ». Pas si vite : la Banque de France n’est pas au bord du précipice. Mais ces pertes soulèvent des questions explosives sur son rôle et son avenir. Que se passe-t-il vraiment ? Et que révèle cette situation sur notre système financier ?

Pourquoi ces pertes colossales ?

Tout commence avec la Banque centrale européenne (BCE). Pour juguler une inflation galopante, la BCE a propulsé ses taux directeurs à 4 %. Conséquence ? La Banque de France, qui rémunère les dépôts des banques commerciales à ce taux, voit ses dépenses s’envoler. En parallèle, ses actifs – souvent des obligations à taux fixes, acquises à l’époque des taux proches de zéro – rapportent des miettes. Le décalage est brutal, et le déficit explose. Ajoutez à cela les chocs économiques du Covid-19 et de la guerre en Ukraine, qui ont secoué les marchés, et vous obtenez un cocktail détonant. Le gouverneur François Villeroy de Galhau l’a répété : ces pertes sont conjoncturelles, liées à des circonstances exceptionnelles. Une banque centrale n’est pas une entreprise privée : elle peut encaisser des déficits, voire créer de la monnaie si nécessaire, sans risquer la faillite.

Mais 7,7 milliards de pertes, ça reste douloureux. Et même si l’institution tient bon, les contribuables pourraient en payer le prix. Si les réserves continuent de fondre, l’État pourrait devoir recapitaliser la Banque de France. En clair, c’est votre argent qui sert de coussin pour amortir ces turbulences.

Une institution reléguée au second plan

Ce qui rend cette situation encore plus crispante, c’est que la Banque de France n’a plus vraiment les manettes. La politique monétaire ? C’est la BCE, depuis Francfort, qui décide de tout. Christine Lagarde et son conseil des gouverneurs fixent les taux, tracent les grandes lignes, et la Banque de France se contente d’exécuter. Elle relaie, elle applique, elle supervise localement, mais elle n’a plus le pouvoir de peser sur les grandes orientations. Une simple intermédiaire, avec un budget de 2,5 milliards d’euros par an, 8800 salariés et 95 succursales. Pourquoi maintenir une telle structure pour un rôle aussi réduit ? La BCE ne pourrait-elle pas traiter directement avec les banques commerciales, sans passer par cette coûteuse courroie de transmission ?

Une souveraineté amputée depuis 1973

Cette érosion du pouvoir n’est pas récente. En 1973, la loi Pompidou-Giscard a marqué un tournant majeur : la Banque de France a perdu le droit de prêter directement à l’État sans intérêts. L’objectif ? Discipliner les finances publiques pour lutter contre l’inflation et aligner la France sur les normes internationales, en prévision de l’intégration européenne. Résultat : l’État doit désormais emprunter sur les marchés financiers, auprès des banques privées, qui se rémunèrent grassement. C’est à ce moment-là que la dette publique a commencé à enfler, et que la Banque de France a vu son rôle s’étioler. Elle n’est plus qu’un rouage dans un système dominé par la BCE et les marchés.

À quoi sert encore la Banque de France ?

Ces pertes, même si elles ne menacent pas l’existence de l’institution, posent une question brûlante : quelle est l’utilité de la Banque de France aujourd’hui ? Pourquoi entretenir une structure aussi lourde – des milliers de salariés, des dizaines d’antennes – pour un rôle qui se limite à appliquer des directives venues d’ailleurs ? Par nostalgie d’une époque où les États maîtrisaient leur monnaie ? Par peur de réformer un système bancal ? Ou, plus troublant, parce que cette situation arrange ceux qui prospèrent dans un monde où la souveraineté monétaire a été sciemment cédée à des entités supranationales et à des marchés financiers ? Ce n’est plus seulement une affaire de technocratie. C’est une question politique : avons-nous délibérément abandonné le contrôle de notre destin économique, et pour quel bénéfice ?

La Banque de France n’est pas en faillite, et elle ne le sera probablement jamais. Mais ses pertes abyssales et son rôle réduit devraient nous réveiller. Cette institution, autrefois cœur battant de notre économie, n’est plus qu’un théâtre d’ombres, maintenu pour faire croire que nous tenons encore les rênes. Comme le disait John Maynard Keynes : « Il n’existe pas de moyen plus subtil ni plus sûr de renverser les bases d’une société que de corrompre sa monnaie. »


Écrivez quelques éclats d'âme...

Dans l'ombre vacillante d'une chandelle, où les murmures du vent se mêlent aux secrets d'un vieux parchemin, je vous invite à tisser une toile de mots. Écrivez quelques éclats d'âme – rêve, étoile, abîme, étreinte, brume – et laissez-les danser sur la page, comme des lucioles dans une nuit d'encre. Que diriez-vous de les entrelacer dans une phrase, un souffle, une histoire ?

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