George Sand
INDIANA

George Sand; "Indiana" / Nouvelle �dition; Paris; Michel L�vy fr.; 1861; nombreuses r��d. Michel L�vy puis Calmann L�vy

TROISIÈME PARTIE

{Perr [204]} XX a.

Indiana ne faisait plus de reproches � Raymon ; il se d�fendait si mal, qu'elle avait peur de le trouver trop coupable. Il y avait une chose qu'elle redoutait bien plus que d'�tre tromp�e, c'�tait d'�tre abandonn�e. Elle ne pouvait plus se passer de croire en lui, d'esp�rer l'avenir qu'il lui avait promis; car la vie qu'elle passait entre M. Delmare et M. Ralph lui �tait devenue odieuse, et, si elle n'e�t compt� se soustraire bient�t � la domination de ces deux hommes, elle se fut noy�e aussi. Elle y pensait souvent; elle se disait que, si Raymon la traitait comme Noun, il ne lui resterait plus d'autre ressource, pour �chapper � un avenir insupportable, que de rejoindre Noun. Cette sombre pens�e la tous lieux, et elle s'y plaisait.

Cependant l'�poque fix�e pour le d�part approchait. Le colonel semblait fort peu s'attendre � la r�sistance que sa femme m�ditait; chaque jour, il mettait ordre � ses affaires; chaque jour, il se lib�rait d'une de ses cr�ances; c'�taient autant de pr�paratifs que madame Delmare regardait d'un œil tranquille, s�re qu'elle �tait de son courage. Elle s'appr�tait aussi de son c�t� � lutter {Perr 205} contre les difficult�s. Elle chercha � se faire d'avance un appui de sa tante, madame de Carvajal; elle lui exprima ses r�pugnances pour ce voyage; et la vieille marquise, qui fondait (en tout bien tout honneur) un grand espoir d'achalandage pour sa soci�t� sur la beaut� de sa ni�ce, d�clara que le devoir du colonel �tait de laisser sa femme en France; qu'il y aurait de la barbarie b � l'exposer aux fatigues et aux dangers d'une travers�e, lorsqu'elle jouissait depuis si peu de temps d'une meilleure sant�; qu'en un mot c'�tait � lui d'aller travailler � sa fortune, � Indiana de rester aupr�s de sa vieille tante pour la soigner. M. Delmare consid�ra d'abord ces insinuations comme le radotage d'une vieille femme; mais il fut forc� d'y faire c plus d'attention lorsque madame de Carvajal lui fit entendre clairement que son h�ritage �tait � ce prix. Quoique Delmare aim�t l'argent comme un homme qui avait ardemment travaill� toute sa vie � en amasser, il avait de la fiert� dans le caract�re; il se pronon�a avec fermet�, et d�clara que sa femme le suivrait � tout risque. La marquise, qui ne pouvait croire que l'argent ne f�t pas le souverain absolu de tout homme de bon sens, ne regarda pas cette r�ponse comme le dernier mot de M. Delmare; elle continua d'encourager d la r�sistance de sa ni�ce, lui proposant e de la couvrir aux yeux du monde du manteau de sa responsabilit�. Il fallait toute l'ind�licatesse d'un esprit corrompu par l'intrigue et l'ambition, toute l'escobarderie d'un cœur d�jet� par la d�votion d'apparat, pour pouvoir ainsi fermer les yeux sur les vrais motifs de r�bellion d'Indiana. Sa passion pour M. de Rami�re n'�tait plus un secret que pour son mari; mais, comme Indiana n'avait point encore donn� prise au scandale, on se passait le secret tout bas, et madame de Carvajal en avait re�u la confidence {Perr 206} de plus de vingt personnes. La vieille folle en �tait flatt�e; tout ce qu'elle d�sirait, c'�tait de mettre sa ni�ce � la mode dans le monde, et l'amour de Raymon �tait un beau d�but. Ce n'�tait pourtant pas un caract�re du temps de la R�gence que celui de madame de Carvajal; la f Restauration avait donn� une impulsion de vertu aux esprits de cette trempe g; et, comme la conduite �tait exig�e � la cour, la marquise ne ha�ssait rien tant que le scandale qui perd et qui ruine. Sous madame du Barry, elle e�t �t� moins rigide dans ses principes; sous la dauphine, elle devint collet mont�. Mais tout ceci �tait pour les dehors, pour les apparences; elle gardait son improbation et son m�pris pour les fautes �clatantes, et, pour condamner une intrigue, elle en attendait toujours le r�sultat. Ces infid�lit�s qui ne passaient point h le seuil de la porte trouvaient gr�ce devant elle. Elle redevenait Espagnole pour juger les passions en de�� de la persienne; il n'y avait de coupable � ses yeux que ce qui s'affichait dans la rue aux regards des passants. Aussi, Indiana, passionn�e et chaste, amoureuse et r�serv�e, �tait un pr�cieux sujet � produire et � exploiter; une femme comme elle pouvait captiver les t�tes culminantes de ce monde hypocrite, et r�sister aux dangers des plus d�licates missions. Il y avait d'excellentes sp�culations � tenter sur la responsabilit� d'une �me si pure et d'une t�te si ardente. Pauvre Indiana! heureusement la fatalit� de son destin passa toutes ses esp�rances, et l'entra�na dans une voie de mis�re o� l'affreuse protection de sa tante n'alla point la chercher.

Raymon ne s'inqui�tait point de ce qu'elle allait devenir. Cet amour i �tait d�j� arriv� pour lui au dernier degr� �lu d�go�t, � l'ennui. Ennuyer, c'est descendre aussi bas qu'il est possible dans le cœur de ce qu'on {Perr 207} aime. Heureusement pour les derniers jours de son illusion, Indiana ne s'en doutait pas encore.

Un matin, en rentrant du bal, il trouva madame Delmare dans sa chambre. Elle y �tait entr�e � minuit; depuis cinq grandes heures, elle l'attendait. On �tait aux jours les plus froids de l'ann�e; elle �tait l� sans feu, la t�te appuy�e sur ses mains, souffrant du froid et de l'inqui�tude avec cette sombre patience que le cours de sa vie lui avait enseign�e. Elle releva la t�te quand elle le vit entrer, et Raymon, p�trifi� de surprise, ne trouva sur son visage p�le aucune expression de d�pit ou de reproche.

— Je vous attendais, lui dit-elle avec douceur; comme depuis trois jours vous n'�tes pas venu, et que, dans cet intervalle, il s'est pass� des choses dont vous devez �tre inform� sans retard j, je suis sortie hier au soir k de chez moi pour venir vous les apprendre.

— C'est une imprudence incroyable! dit Raymon en refermant avec soin la porte sur lui; et mes qui vous savent ici! Ils viennent de me le dire.

— Je ne me suis pas cach�e, r�pondit-elle froidement et, quant au mot dont vous vous servez, je le crois mal choisi.

— J'ai dit imprudence, c'est folie que j'aurais d� dire.

— Moi, j'aurais dit courage. Mais n'importe; �coutez : M. Delmare veut partir pour Bordeaux dans trois jours, et, de l�, pour les colonies. Il a �t� convenu entre vous et moi que vous me soustrairiez � la violence s'il l'employait : il est hors de doute qu'il en sera ainsi; car je me suis prononc�e hier au soir l, et, j'ai �t� enferm�e dans ma chambre. Je me suis �chapp�e par une fen�tre; voyez, mes mains sont en sang. Dans ce moment, on me {Perr 208} cherche peut-�tre; mais Ralph est � Bellerive, et il ne pourra pas dire o� je suis. Je suis d�cid�e � me cacher jusqu'� ce que M. Delmare ait pris le parti m de m'abandonner. Avez-vous song� � m'assurer une retraite, � pr�parer ma fuite? Il y a si longtemps que je n'ai pu vous voir seul, que j'ignore ou en sont vos dispositions; mais, un jour que je vous t�moignais des doutes sur votre r�solution, vous m'avez dit que vous ne conceviez pas l'amour sans la confiance; vous m'avez fait remarquer que jamais vous n'aviez dout� de moi, vous m'avez prouv� que j'�tais injuste, et alors j'ai craint de rester au-dessous de vous si je n'abjurais ces soup�ons pu�rils et ces mille exigences de femme qui rapetissent les amours vulgaires. J'ai support� avec r�signation la bri�vet� de vos visites, la g�ne de nos entretien, l'empressement que vous sembliez mettre � �viter tout �panchement avec moi; j'ai gard� ma confiance en vous. Le ciel m'est t�moin que, lorsque l'inqui�tude et l'�pouvante me rongeaient le cœur, je les repoussais comme de criminelles pens�es. Aujourd'hui, je viens chercher la r�compense de ma foi; le moment est venu : dites, acceptez-vous mes sacrifices?

La crise �tait si pressante, que Raymon ne se sentit plus le courage de feindre. D�sesp�r�, furieux de se voir pris dans ses propres pi�ges, il perdit la raison et s'emporta en mal�dictions brutales et grossi�res.

— Vous �tes n une folle! s'�cria-t-il en se jetant sur son fauteuil. O� avez-vous r�v� l'amour? dans quel roman � l'usage des femmes de chambre avez-vous �tudi� la soci�t�, je vous prie?

Puis il s'arr�ta, s'apercevant qu'il �tait par trop rude o, et cherchant dans sa pens�e les moyens p de lui dire ces choses en d'autres termes et de la renvoyer sans outrage.

{Perr 209} Mais elle �tait calme comme une personne pr�par�e � tout entendre.

— Continuez, dit-elle en croisant ses bras sur son cœur, dont les mouvements se paralysaient par degr�s, je vous �coute; sans doute vous avez plus d'un mot � me dire.

— Encore un effort d'imagination, encore une sc�ne d'amour, pensa Raymon.

Et, se levant avec vivacit� :

— Jamais, s'�cria-t-il, jamais je n'accepterai de tels sacrifices. Quand je t'ai dit que j'en aurais la force, je me suis vant�, Indiana, ou plut�t je me suis calomni�; car il n'est qu'un l�che qui puisse consentir � d�shonorer la femme qu'il aime. Dans ton ignorance de la vie, tu n'as pas compris l'importance d'un pareil dessein, et moi, dans mon d�sespoir de te perdre, je n'ai pas voulu y r�fl�chir...

— La r�flexion vous revient bien vite! dit-elle en lui retirant sa main qu'il voulait prendre.

— Indiana, reprit-il, ne vois-tu pas que tu m'imposes le d�shonneur en te r�servant l'h�ro�sme, et que tu me condamnes, parce que je veux rester digne de ton amour? Pourrais-tu m'aimer encore, q femme ignorante et simple, si je sacrifiais ta vie � mon plaisir, ta r�putation � mes int�r�ts?

— Vous dites des choses bien contradictoires, dit Indiana; si, en restant pr�s de vous, je vous donne du bonheur, que craignez-vous de l'opinion? Tenez-vous plus � elle qu'� moi?

— Eh! ce n'est pas pour moi que j'y tiens, Indiana!...

— C'est donc pour moi? J'ai pr�vu vos scrupules, et, pour vous affranchir de tout remords, j'ai pris l'initiative; je n'ai pas attendu que vous vinssiez m'arracher {Perr 210} de mon m�nage, je ne vous ai pas m�me consult� Pour franchir � jamais le seuil de ma maison. Ce pas d�cisif, il est fait, et votre conscience ne peut vous le reprocher. À l'heure qu'il est, Raymon, je suis d�shonor�e. En votre absence, j'ai compt� � cette pendule les heures qui consommaient mon opprobre; et maintenant, quoique le jour naissant trouve mon front aussi pur qu'il l'�tait hier, je suis une femme perdue dans l'opinion publique. Hier, il y avait encore de la compassion pour moi dans le cœur des femmes; aujourd'hui, il n'y aura plus que des m�pris. J'ai pes� tout cela avant d'agir.

— Abominable pr�voyance de femme! pensa Raymon.

Et puis, luttant contre elle comme il e�t fait contre un recors qui serait venu le saisir dans ses meubles.

— Vous vous exag�rez l'importance de votre d�marche, lui dit-il d'un ton caressant et paternel. Non, mon amie, tout n'est pas perdu pour une �tourderie. J'imposerai silence � mes gens...

— Imposerez-vous silence aux miens, qui sans doute me cherchent avec anxi�t� dans ce moment-ci? Et mon mari, pensez-vous qu'il me garde paisiblement le secret? pensez-vous qu'il veuille me recevoir demain, quand j'aurai pass� toute une nuit sous votre toit? Me conseillerez-vous de retourner me mettre � ses pieds et de lui demander, en signe de gr�ce, qu'il veuille bien me remettre au cou la cha�ne sous laquelle s'est bris�e ma vie et fl�trie ma jeunesse? Vous consentiriez sans regret � voir rentrer sous la domination d'un autre cette femme que vous aimiez tant, quand vous �tes ma�tre de son sort, quand vous pouvez la garder toute votre vie dans vos bras, quand elle est l� en votre pouvoir, vous offrant d'y rester toujours! Vous n'auriez pas quelque r�pugnance, quelque frayeur � la rendre tout � l'heure � ce {Perr 211} ma�tre implacable qui ne l'attend peut-�tre que pour la tuer?

Une id�e rapide traversa le cerveau de Raymon. Le moment �tait venu de dompter cet orgueil de femme, ou il ne viendrait jamais. Elle venait lui offrir tous les sacrifices dont il ne voulait pas, et elle se tenait l� devant lui avec la confiance hautaine qu'elle ne courait r d'autres dangers que ceux qu'elle avait pr�vus. Raymon imaginait un moyen de se d�barrasser de son importun d�vouement ou d'en tirer quelque chose. Il �tait trop l'ami de Delmare, il devait trop d'�gards � la confiance de cet homme pour lui ravir sa femme; il devait se contenter de la s�duire.

— Tu as raison, mon Indiana, s'�cria-t-il avec feu tu me rends � moi-m�me, tu r�veilles mes transports, que l'id�e de tes dangers et la crainte de te nuire avaient glac�s. Pardonne � ma pu�rile sollicitude et comprends tout ce qu'elle renferme de tendresse et de v�ritable amour. Mais ta douce voix fait fr�mir tout mon sang, tes paroles br�lantes versent du feu dans mes veines; pardonne, pardonne-moi d'avoir pu songer � autre chose qu'� cet ineffable instant o� je te poss�de. Laisse-moi oublier tous les dangers qui nous pressent et te remercier � genoux du bonheur que tu m'apportes; laisse-moi vivre tout entier dans cette heure de d�lices que je passe � tes pieds et que tout mon sang ne payerait pas. Qu'il vienne donc te ravir � mes transports, ce mari stupide qui t'enferme et s'endort sur sa grossi�re violence! Qu'il vienne t'arracher de mes bras, toi mon bien, ma vie! D�sormais tu ne lui appartiens plus; tu es mon amante, ma compagne, ma ma�tresse...

En parlant s ainsi, Raymon s'exalta peu � peu, comme il avait coutume de faire en plaidant ses passions. La {Perr 212} situation �tait puissante, romanesque; elle offrait des dangers t. Raymon aimait le p�ril en v�ritable descendant d'une race de preux. Chaque bruit qu'il entendait dans la rue lui semblait �tre l'approche du mari r�clamer sa femme et le sang de son rival. Chercher les volupt�s de l'amour dans les �motions excitantes d'une telle position �tait un plaisir digne de Raymon. Pendant un quart d'heure, il aima passionn�ment madame Delmare; il lui prodigua les s�ductions d'une �loquence br�lante. Il fut u vraiment puissant dans son langage et vrai dans son jeu, cet homme dont la t�te ardente traitait l'amour comme un art d'agr�ment. Il joua la passion � s'y tromper lui-m�me. Honte v � cette femme imb�cile! Elle s'abandonna avec d�lices � ces trompeuses d�monstrations; elle se sentit heureuse, elle rayonna d'esp�rance et de joie; elle pardonna tout, elle faillit tout accorder.

Mais Raymon se perdit lui-m�me par trop de pr�cipitation. S'il e�t port� l'art jusqu'� prolonger quatre heures de plus la situation o� Indiana �tait venue se risquer w, elle �tait � lui peut-�tre. Mais le jour se levait vermeil et brillant; il jetait des torrents de lumi�re dans l'appartement, et le bruit du dehors croissait � chaque instant x. Raymon lan�a un regard sur la pendule y, qui marquait sept heures.

— Il est temps d'en finir, pensa-t-il; d'un instant � l'autre, Delmare peut arriver, et il faut qu'auparavant je la d�termine � rentrer de bon gr� chez elle.

Il devint plus pressant et moins tendre; la p�leur de ses l�vres trahissait le tourment d'une impatience plus imp�rieuse que d�licate. Il y avait de la brusquerie et presque de la col�re dans ses baisers. Indiana eut peur. Un bon ange �tendit ses ailes sur cette �me chancelante et troubl�e; elle se {Perr 213} r�veilla et repoussa les attaques du vice �go�ste et froid.

— Laissez-moi, dit-elle; je ne veux pas c�der par faiblesse ce que je veux pouvoir accorder par amour ou par reconnaissance. Vous ne pouvez pas avoir besoin de preuves de mon affection ; c'en est une assez grande que ma pr�sence ici, et je vous apporte l'avenir avec moi. Mais laissez-moi garder toute la force de ma conscience pour lutter contre les obstacles puissants qui z nous s�parent encore; j'ai besoin de sto�cisme et de calme.

— De quoi me parlez-vous? dit avec col�re Raymon, qui ne l'�coutait pas et qui s'indignait de sa r�sistance.

Et, perdant tout � fait la t�te dans cet instant de souffrance et de d�pit, il la repoussa rudement, marcha dans la chambre la poitrine oppress�e, la t�te en feu; puis il prit une carafe aa et avala un grand verre d'eau qui calma tout d'un coup son d�lire et refroidit son amour. Alors il la regarda ironiquement et lui dit :

— Allons, madame, il est temps de vous retirer.

Un rayon de lumi�re vint enfin �clairer Indiana et lui montrer � nu l'�me de Raymon.

— Vous avez raison, dit-elle.

Et elle se dirigea vers la porte.

— Prenez donc votre manteau et votre boa, lui dit-il en l'arr�tant.

— Il est vrai, r�pondit-elle, ces traces de ma pr�sence pourraient vous compromettre.

— Vous �tes une enfant ab, lui dit-il d'un ton patelin en lui mettant son manteau avec un soin pu�ril, vous savez bien que je vous aime; mais vraiment vous prenez plaisir � me torturer, et vous me rendez fou. Attendez que j'aille demander un fiacre. Si je le pouvais, je vous reconduirais jusque chez vous; mais ce serait vous perdre.

{Perr 214} — Et croyez-vous donc que je ne sois pas d�j� perdue? dit-elle avec amertume.

— Non, ma ch�rie, r�pondit Raymon, qui ne demandait plus qu'� lui persuader de le laisser tranquille. On ne s'est pas aper�u de votre absence, puisqu'on n'est pas encore venu vous demander ici. Quoiqu'on m'e�t soup�onn� le dernier, il �tait naturel d'aller faire des perquisitions chez toutes les personnes de votre connaissance. Et puis vous pouvez aller vous mettre sous la protection de votre tante : c'est m�me le parti que je vous conseille de prendre; elle conciliera tout. Vous serez cens�e avoir pass� la nuit chez elle...

Madame Delmare n'�coutait pas; elle regardait d'un air stupide le soleil large et rouge qui montait sur un horizon de toits �tincelants. Raymon essaya de la tirer de cette pr�occupation. Elle reporta ses yeux sur lui, mais elle sembla ne pas le reconna�tre. Ses joues avaient une teinte verd�tre, et ses l�vres s�ches semblaient paralys�es.

Raymon eut peur. Il se rappela le suicide de l'autre, et, dans son effroi, ne sachant que devenir, craignant d'�tre deux fois criminel � ses propres yeux, mais se sentant trop �puis� d'esprit pour r�ussir � la tromper encore, il l'assit doucement sur son fauteuil, l'enferma, et monta � l'appartement de sa m�re.


Variantes

  1. IV {RoDu}{Goss} ♦ XX {Perr} et sq.
  2. qu'il y aurait barbarie {RoDu} ♦ qu'il y aurait de la barbarie {Goss} et sq.
  3. d'y accorder {RoDu} ♦ d'y faire {Goss} et sq.
  4. elle continua � encourager {RoDu}{Hetz} ♦ elle continua d'encourager {MLevy}, {CL} et sq.
  5. lui promettant {RoDu}, {Goss} ♦ lui proposant {Perr} et sq.
  6. Carvajal; c'�tait parmi les �mes viles, la plus �lev�e qu'on p�t trouver. La {RoDu}, {Goss} ♦ Carvajal; la {Perr} et sq.
  7. de sa trempe {RoDu}, {Goss} ♦ de cette trempe {Perr} et sq.
  8. Les infid�lit�s qui ne passaient pas {RoDu}{Hetz} ♦ Ces infid�lit�s qui ne passaient point {MLevy}, {CL}
  9. devenir. Que voulez-vous? Cet amour {RoDu} ♦ devenir. Cet amour {Goss} et sq.
  10. des choses dont la connaissance est impossible � diff�rer {RoDu}, {Goss} ♦ des choses dont vous devez �tre inform� sans retard {Perr} et sq.
  11. hier soir {RoDu}{Hetz} ♦ hier au soir {MLevy}, {CL}
  12. hier soir {RoDu}{Hetz} ♦ hier au soir {CL}
  13. ait pris son parti{RoDu} ♦ ait pris le parti {Goss} et sq.
  14. feindre. / — Vous �tes {RoDu}, {Goss} ♦ feindre. D�sesp�r�, [...] grossi�res. / — Vous �tes {Perr} et sq.
  15. s'arr�ta, craignant d'�tre trop rude {RoDu}, {Goss} ♦ s'arr�ta, s'apercevant qu'il �tait par trop rude {Perr} et sq.
  16. cherchant dans ses facult�s intellectuelles le moyen {RoDu} ♦ cherchant dans sa pens�e les moyens {Goss} et sq.
  17. m'aimer encore, dis donc, {RoDu} ♦ m'aimer encore, {Goss} et sq.
  18. qu'elle n'y courait {RoDu} ♦ qu'elle ne courait {Goss} et sq.
  19. {Hetz}{CL} donnent En plaidant; Pierre Salomon a relev� cette erreur.
  20. des dangers qui la relevaient de tout le piquant du drame � la mode {RoDu} ♦ des dangers {Goss} et sq.
  21. br�lante; il l'accabla de ses ardentes caresses qu'un homme jeune trouve toujours suaves et p�n�trantes sur le sein d'une belle femme, sans �tre oblig� de l'aimer au-del� de l'acc�s de fi�vre morale qu'elle lui inspire. Il fut {RoDu}, {Goss} ♦ br�lante. Il fut {Perr} et sq.
  22. lui-m�me, et honte {RoDu} ♦ lui-m�me. Honte {Goss} et sq.
  23. prolonger la situation o� Indiana �tait venue se risquer vingt-quatre heures de plus {RoDu} ♦ prolonger quatre heures de plus la situation o� Indiana �tait venue se risquer {Goss} et sq.
  24. croissait avec lui {RoDu} ♦ croissait � chaque instant {Goss} et sq.
  25. � la pendule {RoDu} ♦ sur la pendule {Goss} et sq.
  26. les obstacles qui {RoDu} ♦ les obstacles puissants qui {Goss} et sq.
  27. caraffe {RoDu} ♦ carafe {Goss} et sq.
  28. un enfant {RoDu}, {Goss} ♦ une enfant {Perr} et sq.

Notes