GEORGE SAND
HISTOIRE DE MA VIE

Calmann-L�vy 1876

{[Presse 6/11/54 2]; LP T.? ?; CL T.1 [389]; Lub T.1 [323]} DEUXIÈME PARTIE
Mes premi�res ann�es
1800-1810 a

{Presse 18/11/54 1; CL T.2 [73]; Lub T.1 [465]} VIII b

Date de ce travail. — Mon signalement c. — Opinion na�ve de ma m�re sur le mariage civil et le mariage religieux. — Le corset de madame Murat. — Disgr�ce absolue des �tats-majors. — D�chirement de cœur d. — Diplomatie maternelle.



Tout ce qui pr�c�de a �t� �crit sous la monarchie de Louis-Philippe. Je reprends ce travail le 1er juin 1848, r�servant pour une autre phase de mon r�cit ce que j'ai vu et ressenti durant cette lacune.

J'ai beaucoup appris, beaucoup v�cu, beaucoup vieilli durant ce court intervalle, et mon appr�ciation actuelle de toutes les id�es qui ont rempli le cours de ma vie se ressentira peut-�tre de cette tardive et rapide exp�rience de la vie g�n�rale. Je n'en serai pas moins sinc�re envers moi-m�me; mais Dieu sait si j'aurai la m�me foi na�ve, la m�me ardeur confiante qui me soutenaient int�rieurement! e

Si j'eusse fini mon livre avant cette r�volution f, c'e�t �t� un autre livre, celui d'un solitaire, d'un enfant g�n�reux, j'ose le dire, car je n'avais �tudi� l'humanit� que sur des individus souvent exceptionnels et toujours examin�s par moi � loisir g. Depuis j'ai fait, de l'œil, une campagne dans le monde des faits, et je n'en suis point revenue telle que j'y �tais entr�e. J'y ai perdu les illusions de la jeunesse, que, par un privil�ge d� � ma vie de retraite et de contemplation, j'avais conserv�es h plus tard que de raison.

Mon livre sera donc triste si je reste sous l'impression que j'ai re�ue dans ces derniers temps. Mais qui sait? Le {CL 74} temps marche vite, et, apr�s tout, l'humanit� n'est pas diff�rente de moi, c'est-�-dire qu'elle se d�courage et se {Lub 466} ranime avec une grande facilit�. Dieu me pr�serve de croire, comme Jean-Jacques Rousseau, que je vaux mieux que mes contemporains et que j'ai acquis le droit de les maudire! Jean-Jacques �tait malade quand il voulait s�parer sa cause de celle de l'humanit� i. Nous avons tous souffert plus ou moins en ce si�cle de la maladie de Jean-Jacques Rousseau j. T�chons d'en gu�rir avec l'aide de Dieu!

Le 5 juillet 1804, je vins au monde k, mon p�re jouant du violon et ma m�re ayant une jolie robe rose. Ce fut l'affaire d'un instant. J'eus du moins cette part de bonheur que me pr�disait ma tante Lucie de ne point faire souffrir longtemps ma m�re. Je vins au monde fille l�gitime, ce qui aurait fort bien pu ne pas arriver si mon p�re n'avait pas r�sol�ment march� sur les pr�jug�s de sa famille, et cela fut un bonheur aussi l, car sans cela ma grand'm�re ne se f�t peut-�tre pas occup�e de moi m avec autant d'amour qu'elle le fit plus tard, et j'eusse �t� priv�e d'un petit fonds d'id�es et de connaissances qui a fait ma consolation dans les ennuis de ma vie.

J'�tais fortement constitu�e, et, durant toute mon enfance, j'annon�ais devoir �tre fort belle, promesse que je n'ai point tenue. Il y eut peut-�tre de ma faute, car � l'�ge o� la beaut� fleurit, je passais d�j� les nuits � lire et � �crire. Étant fille de deux �tres d'une beaut� parfaite, j'aurais d� ne pas d�g�n�rer, et ma pauvre m�re, qui estimait la beaut� plus que tout, m'en faisait souvent de na�fs reproches. Pour moi, je ne pus jamais m'astreindre � soigner ma personne. Autant j'aime l'extr�me propret�, autant les recherches de la mollesse m'ont toujours paru insupportables.

Se priver de travail pour avoir l'œil frais, ne pas courir au soleil quand ce bon soleil n de Dieu vous attire irr�sistiblement o, {CL 75} ne point marcher dans de bons gros sabots de peur de se d�former le cou-de-pied, porter des gants, c'est-�-dire renoncer � l'adresse et � la force de ses mains, se condamner � une �ternelle gaucherie, � une �ternelle d�bilit� p, ne jamais se fatiguer quand tout nous commande de ne point nous �pargner, vivre enfin sous une cloche pour n'�tre ni h�l�e, ni gerc�e, ni fl�trie avant l'�ge, voil� ce qu'il me fut toujours impossible d'observer. Ma grand'm�re rench�rissait encore {Lub 467} sur les r�primandes de ma m�re, et le chapitre des chapeaux et des gants fit le d�sespoir de mon enfance; mais, quoique je ne fusse pas volontairement rebelle, la contrainte ne put m'atteindre. Je n'eus qu'un instant de fra�cheur et jamais de beaut�. Mes traits �taient cependant assez bien form�s, mais je ne songeai jamais � leur donner la moindre expression. L'habitude contract�e, presque d�s le berceau, d'une r�verie dont il me serait impossible de me rendre compte � moi-m�me, me donna de bonne heure l'air b�te. Je dis le mot tout net, parce que toute ma vie, dans l'enfance, au couvent, dans l'intimit� de la famille, on me l'a dit de m�me, et qu'il faut bien que cela soit vrai q.

Somme toute, avec des cheveux, des yeux, des dents et aucune difformit�, je ne fus ni laide ni belle dans ma jeunesse r, avantage que je consid�re comme s�rieux � mon point de vue, car la laideur inspire des pr�ventions dans un sens, la beaut� dans un autre. On attend trop d'un ext�rieur brillant, on se m�fie trop d'un ext�rieur qui repousse. Il vaut mieux avoir une bonne figure qui n'�blouit et n'effraye personne, et je m'en suis bien trouv�e avec mes amis des deux sexes.

J'ai parl� de ma figure, afin de n'avoir plus du tout � en parler. Dans le r�cit de la vie d'une femme, ce chapitre, mena�ant de se prolonger ind�finiment, pourrait effrayer le lecteur; je me suis conform�e � l'usage, qui est de faire {CL 76} la description ext�rieure du personnage que l'on met en sc�ne, et je l'ai fait d�s le premier mot qui me concerne, afin de me d�barrasser compl�tement de cette pu�rilit� dans tout le cours de mon r�cit; j'aurais peut-�tre pu ne pas m'en occuper du tout; j'ai consult� l'usage, et j'ai vu que des hommes tr�s-s�rieux, en racontant leur vie, n'avaient pas cru devoir s'y soustraire. Il y aurait donc eu peut-�tre une apparence de pr�tention � ne pas payer cette petite dette � la curiosit� souvent un peu niaise du lecteur.

Je d�sire pourtant qu'� l'avenir on se d�robe � cette exigence des curieux, et que si on est absolument forc� de tracer son portrait, on se borne � copier sur son passe-port le signalement r�dig� par le commissaire de police de son quartier, dans un style qui n'a rien d'emphatique ni de compromettant. Voici le mien: yeux noirs, cheveux noirs, front ordinaire, teint p�le, nez bien fait, {Lub 468} menton rond, bouche moyenne, taille quatre pieds dix pouces, signes particuliers, aucun.

Mais justement, � ce propos, je dois dire ici une circonstance assez bizarre; c'est qu'il n'y a pas plus de deux ou trois ans que je sais positivement qui je suis. J'ignore quels motifs ou quelles r�veries port�rent plusieurs personnes, qui pr�tendaient m'avoir vue na�tre, � me dire que, pour des raisons de famille faciles � deviner dans un mariage secret, on ne m'avait pas attribu� l�galement mon �ge v�ritable. Selon cette version, je serais n�e � Madrid, en 1802 ou 1803, et l'acte de naissance qui porte mon nom s aurait �t�, en r�alit�, celui d'un autre enfant n� depuis, et mort peu de temps apr�s.

Comme les registres de l'�tat civil n'avaient pas encore acquis � cette �poque la rigoureuse exactitude que l'habitude de la l�gislation nouvelle leur a donn�e depuis, comme dans le mariage de mon p�re il y eut en effet des irr�gularit�s singuli�res dont je vais bient�t parler et qu'il {CL 77} serait impossible de commettre aujourd'hui, le r�cit qui m'abusa n'�tait pas aussi invraisemblable qu'on pourrait le croire. En outre, comme en me faisant cette r�v�lation pr�tendue, t on m'avait assur� que mes parents ne me diraient pas la v�rit� sur ce point, je m'abstins toujours de les interroger et demeurai persuad�e que j'�tais n�e � Madrid et que j'avais un an ou deux de plus que mon �ge pr�sum�. À cette �poque, je lus rapidement la correspondance de mon p�re avec ma grand'm�re, et une lettre mal dat�e, intercal�e mal � propos dans le recueil de 1803, me confirma dans mon erreur. Cette lettre, qu'on trouvera � sa place v�ritable, ne m'abusa plus, lorsqu'au moment de transcrire cette correspondance, je pus y porter un examen plus attentif. Enfin un ensemble de lettres sans int�r�t pour le lecteur, mais tr�s-int�ressantes pour me fixer sur ce point, lettres que je n'avais jamais class�es et jamais lues, me donnent enfin la certitude de mon identit�. Je suis bien n�e � Paris le 5 juillet 1804, je suis bien moi-m�me, en un mot, ce qui ne laisse pas que de m'�tre agr�able, car il y a toujours quelque chose de g�nant � douter de son nom, de son �ge et de son pays. Or j'ai subi ce doute pendant une quinzaine d'ann�es u sans savoir que j'avais dans quelques vieux tiroirs inexplor�s de quoi le dissiper enti�rement. Il est vrai que l�, comme dans tout, j'ai port� une {Lub 469} habitude de paresse v naturelle pour ce qui me concerne personnellement, et que j'aurais pu mourir sans savoir si j'avais v�cu en personne ou � la place d'un autre, si l'id�e ne m'�tait venue d'�crire ma vie, et d'en approfondir le commencement. w

Mon p�re avait fait publier ses bans � Boulogne-Sur-Mer, et il contracta mariage � Paris � l'insu de sa m�re; ce qui ne serait point possible aujourd'hui le fut alors, gr�ce au d�sordre et � l'incertitude que la R�volution avait apport�s dans les relations. Le nouveau code laissait quelques {CL 78} moyens d'�luder les actes respectueux, et le cas d'absence avait �t� rendu fr�quemment et facilement supposable par l'�migration. C'�tait un moment de transition entre l'ancienne soci�t� et la nouvelle, et les rouages des lois civiles ne fonctionnaient pas avec r�gularit�. Je ne rapporterai pas les d�tails, pour ne pas ennuyer le lecteur par des points de droit fort arides, bien que j'aie toutes les pi�ces sous les yeux. Certainement il y eut absence ou insuffisance de certaines formalit�s qui seraient indispensables aujourd'hui, et qui apparemment n'�taient pas jug�es alors d'une importance absolue.

Ma m�re �tait au moral un exemple de cette situation transitoire. Tout ce qu'elle avait compris de l'acte civil de son mariage, c'est qu'il assurait la l�gitimit� de ma naissance. Elle �tait pieuse et le fut toujours, sans aller jusqu'� la d�votion; mais ce qu'elle avait cru dans son enfance, elle devait le croire toute sa vie, sans s'inqui�ter des lois civiles et sans penser qu'un acte par-devant le citoyen municipal p�t remplacer un sacrement. Elle ne se fit donc pas scrupule des irr�gularit�s qui facilit�rent son mariage civil, mais elle le porta si loin quand il fut question du mariage religieux, que ma grand'm�re, malgr� ses r�pugnances, fut oblig�e d'y assister. Cela eut lieu plus tard, comme je le dirai.

Jusque-l� ma m�re ne se crut point complice d'un acte de r�bellion envers la m�re de son mari; et quand on lui disait que Madame Dupin �tait fort irrit�e contre elle, elle avait coutume de r�pondre: « Vraiment, c'est bien injuste, et elle ne me conna�t gu�re; dites-lui donc que je n'�pouserai jamais son fils � l'�glise tant qu'elle ne le voudra pas. »

Mon p�re, voyant qu'il ne vaincrait jamais ce pr�jug� na�f et respectable, croyance vraie au fond, car, � moins {Lub 470} de nier Dieu, il faut vouloir que la pens�e de Dieu intervienne {CL 79} dans une cons�cration {Presse 18/11/54 2} comme celle du mariage, mon p�re avait le plus grand d�sir de faire consacrer le sien. Jusque-l�, il tremblait que Sophie, ne se regardant pas comme engag�e par sa conscience, n'en v�nt � tout remettre en question. Il ne doutait point d'elle, il n'en pouvait pas douter sous le rapport de l'attachement et de la fid�lit�. Mais elle avait des acc�s de fiert� terrible quand il lui laissait entrevoir l'opposition de sa m�re. Elle ne parlait de rien moins que d'aller au loin vivre de son travail avec ses enfants, et de montrer par l� qu'elle ne voulait recevoir ni aum�ne ni pardon de cette orgueilleuse grande dame, dont elle se faisait une bien fausse et bien terrible id�e.

Lorsque Maurice voulait lui persuader que le mariage contract� �tait indissoluble, et que sa m�re viendrait � y souscrire t�t ou tard: « Eh non, disait-elle, votre mariage civil ne prouve rien, puisqu'il permet le divorce. L'�glise ne le permet pas. Nous ne sommes donc pas mari�s, et ta m�re n'a rien � me reprocher. Il me suffit que notre fille (j'�tais n�e alors) ait un sort assur�. Mais quant � moi, je ne te demande rien, et je n'ai � rougir devant personne. »

Ce raisonnement plein de force et de simplicit�, la soci�t� ne le ratifiait pas, il est vrai. Elle le ratifierait encore moins aujourd'hui qu'elle s'est assise d�finitivement sur une base civile. Mais � l'�poque o� ces choses se passaient, on avait d�j� vu tant d'�branlements et de prodiges qu'on ne savait pas bien sur quel terrain l'on marchait. Ma m�re avait les id�es du peuple sur tout cela. Elle ne jugeait ni les causes ni les effets de ces nouvelles bases de la soci�t� r�volutionnaire. « Cela changera encore, disait-elle, j'ai vu le temps o� il n'y avait pas d'autre mariage que le mariage religieux. Tout � coup on a pr�tendu que celui-l� ne valait rien et ne compterait plus. On en a invent� un autre qui ne durera pas et qui ne peut pas compter. »

{CL 80} Il a dur�, mais en se modifiant d'une mani�re essentielle. Le divorce a �t� permis, puis aboli, et � pr�sent on parle de le r�tablir*. Jamais moment n'a �t� plus mal {Lub 471} choisi pour soulever une aussi grave question, et bien que j'aie des id�es arr�t�es � cet �gard, si j'�tais de l'assembl�e, je demanderais l'ordre du jour. On ne peut pas r�gler le sort et la religion de la famille dans un moment o� la soci�t� est dans le d�sordre moral, pour ne pas dire dans l'anarchie. Aussi, lorsqu'il sera question de discuter cela, l'id�e religieuse et l'id�e civile vont se trouver encore une fois aux prises, au lieu de chercher cet accord sans lequel la loi n'a point de sens et n'atteint pas son but. Que le divorce soit rejet�, ce sera la cons�cration d'un �tat de choses contraire � la morale publique. Qu'il soit adopt�, il le sera de telle mani�re et dans de telles circonstances qu'il ne servira point la morale et ajoutera � la dissolution du pacte religieux de la famille. Je dirai mon opinion quand il faudra, et je reviens � mon r�cit.

[{Lub 470}] * J'�cris ceci le 2 juin 1848. J'ignore quelle sera la solution du projet pr�sent� � l'Assembl�e nationale par le ministre Cr�mieux.

Mon p�re avait vingt-six ans, ma m�re en avait trente lorsque je vins au monde. Ma m�re n'avait jamais lu Jean-Jacques Rousseau et n'en avait peut-�tre pas beaucoup entendu parler, ce qui ne l'emp�cha pas d'�tre ma nourrice, comme elle l'avait �t� et comme elle le fut de tous ses autres enfants. Mais, pour mettre de l'ordre dans le cours de ma propre histoire, il faut que je continue � suivre celle de mon p�re, dont les lettres me servent de jalons, car on peut bien imaginer que mes propres souvenirs ne datent pas encore de l'an XII.

Il passa une quinzaine � Nohant apr�s son mariage, ainsi que je l'ai dit au pr�c�dent chapitre, et ne trouva aucun moyen d'en faire l'aveu � sa m�re. Il revint � Paris {CL 81} sous pr�texte de poursuivre cet �ternel brevet de capitaine qui n'arrivait pas, et il trouva toutes ses connaissances, tous ses parents fort bien trait�s par la nouvelle monarchie: Caulaincourt grand �cuyer de l'empereur, le g�n�ral d'Harville grand �cuyer de l'imp�ratrice Jos�phine, le bon neveu Ren� chambellan du prince Louis, sa femme dame de compagnie de la princesse, etc. Cette derni�re pr�senta � Madame Murat un �tat de services de mon p�re, que Madame Murat mit dans son corset, ce qui fait dire � mon p�re � la date du 12 prairial an XII: « Voici le temps revenu o� les dames disposent des grades et o� le corset d'une princesse nous promet plus que le champ de bataille. Soit! j'esp�re me laver de ce corset-l� quand nous aurons la guerre, et bien remercier mon pays de ce que mon pays me force � mal gagner. »

{Lub 472} Puis revenant � ses chagrins personnels: « On m'apporte � l'instant, ma bonne m�re, une lettre de toi, o� tu m'affliges en t'affligeant. Tu pr�tends que j'ai �t� soucieux aupr�s de toi, et que des mots d'impatience me sont �chapp�s. Mais est-ce que je t'en ai jamais, m�me dans ma pens�e, adress� un seul. J'aimerais mieux mourir. Tu sais bien que c'�tait � l'adresse de Deschartres, en remboursement de ses sermons blessants et intempestifs. Jamais, quand j'ai �t� pr�s de toi, je n'ai appel� avec impatience le jour qui devait m'en �loigner. Ah! que tout cela est cruel, et que j'en souffre! Je retournerai bient�t te demander raison de tes lettres, m�chante m�re que je ch�ris. »

Je vins au monde le 12 messidor. Ma grand'm�re n'en sut rien. Le 16, mon p�re lui �crivait sur tout autre chose.

{CL 82} LETTRE PREMIÈRE

DE MAURICE À SA MÈRE A NOHANT

Paris, 16 messidor an XII.

J'ai re�u ton aimable lettre pour Lacu�e. Je la lui ai port�e moi-m�me. Il �tait � Saint-Cloud. J'y suis retourn� hier, et je l'ai vu. Ma demande est au bureau de la guerre et doit �tre mise sous les yeux de l'empereur la semaine prochaine. Je suis port� sur le tableau d'avancement. D'un autre c�t�, notre famille fait son chemin: M. de S�gur vient d'�tre nomm� grand dignitaire de l'Empire et grand ma�tre des c�r�monies, avec 100,000 francs, d'appointements, plus 40,000 comme conseiller d'État. Ren� entre en fonctions avec une grande clef d'or brod�e au derri�re. Le prince va avoir une garde. Apolline m'y promet une compagnie. Le prince sera grand conn�table. Je me frotte les yeux pour savoir si je ne fais pas un r�ve absurde, mais j'ai beau les refermer l'ambition ne vient pas, et je me sens toujours partag� entre celle d'aller me battre ou celle d'aller vivre pr�s de toi. Je n'en puis avoir de plus brillante, et celle des autres me fait toujours un dr�le d'effet. Je me r�jouis pourtant du bonheur de ceux que j'aime, parce que je ne suis pas n� jaloux. Mais mon bonheur ne serait pas fait comme cela. {Lub 473} Je voudrais de l'activit�, de l'honneur, ou bien une petite aisance et le bonheur domestique. Si j'�tais capitaine, tu pourrais venir ici, j'aurais bien de quoi avoir un cabriolet bien suspendu pour te promener, je te soignerais, je te ferais oublier toutes nos tristesses. Deschartres n'�tant pas l�, nous serions encore heureux comme autrefois, {CL 83} j'en suis s�r. Je t'aime tant, quoi que tu en dises, que tu finirais bien par y croire. Ta derni�re lettre est bonne comme toi, et, dans ma joie, je l'ai montr�e � tout le monde*. Ne me gronde pas! Je t'embrasse de toute mon �me.

Beaumont a fait un m�lodrame pour la Porte-Saint-Martin. Ce n'est pas bon, mais cela n'est pas n�cessaire pour avoir du succ�s. Et d'ailleurs cela l'amuse tant**.

Le voyage de l'empereur remet au mois de septembre mon projet de retourner de suite aupr�s de toi, mais alors j'irai faire tes vendanges, et si Deschartres fait encore le docteur, je le camperai dans sa cuve. x

* C'est-�-dire � Sophie.
** J'ignore quel fut le sort du m�lodrame de mon grand-oncle. Je n'en sais m�me pas le titre.


LETTRE II

1er thermidor an XII.

L'empereur est parti hier dans la nuit, et tu me crois sans doute en route pour Boulogne. Je fais mieux que cela, je m'appr�te � te porter un bouquet pour ta f�te et un compliment compos� de mille embrassades bien tendres. De Couchy s'est charg� de faire entendre � Dupont que mes affaires sont en meilleur train ici qu'elles ne le seraient l�-bas, puisque Dupont doit revenir dans huit jours et que je n'ai rien � gagner � chercher les regards de l'empereur. L'affaire de Sedan nous a assez prouv� que, dans ces occasions-l�, on aime mieux nous cacher que nous montrer. Dupont ne peut pas le nier et ne peut pas trouver mauvais que je ne sois pas press� de m'y faire reprendre. S'il s'agissait d'aller recevoir des coups de fusil, il y aurait de la place et je m'empresserais d'y �tre. Mais {CL 84 } il n'y a pas de place pour recevoir les coups d'œil du ma�tre, et moi je n'y tiens pas autrement. Qu'on s'y pousse, qu'on s'y rue, qu'on s'y tue, ce m�tier-l� m'est {Lub 474} odieux . Si Sa Majest� veut savoir qui je suis, elle trouvera mes preuves dans ses valises; car ma demande court la poste avec elle. Comme son travail particulier se continue toujours, m�me quand il est en voyage, mes �tats de service et mes droits sont dans les portefeuilles qui l'accompagnent, et peut-�tre m'exp�diera-t-il au galop ce brevet tant d�sir�. M. de S�gur m'assure, que cela ne peut manquer. Berthier lui disait hier: « Je connais cet officier. Il a de tr�s-bons services, il m�rite de l'avancement, je l'ai apostille moi-m�me sur le tableau. »

Ren� est d�cid�ment brevet� chambellan. Ses fonctions consistent � pr�senter au prince les ambassadeurs, � faire les honneurs du palais, � veiller � l'ordre des c�r�monies. Il a pour coll�gue M. d'Arjuson. Les fonctions d'Apolline consistent dans une toilette �l�gante, et dans des petits soins pour la princesse, qu'elle accompagne comme une confidente de trag�die. Je la fais enrager en l'appelant Albine ou Œnone. Je traite Ren� d''Arcas et d'Arbates. Ils se f�chent d'abord et finissent par rire. Ces dames les ont assimil�s � des pestif�r�s; car elles ne mettent plus les pieds chez eux, et ils en sont tout consol�s. Le m�lodrame de l'oncle Beaumont est en r�p�tition. Si Deschartres n'�tait pas un sot, il se lancerait dans la carri�re dramatique au lieu de s'occuper de l'assiette de l'imp�t foncier, et de mille autres fadaises. Mais j'aurai beau l'endoctriner, je n'en ferai jamais rien. Je te charge de lui dire que, s'il ne fait pas bien �triller ses bœufs et ratisser ses all�es pour mon arriv�e, il aura affaire � moi.
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

{CL 85} La r�ponse de l'empereur relativement au brevet de capitaine fut que toute demande d'avancement pour tout ce qui tenait � l'�tat-major serait ajourn�e � un an. Mon p�re partagea la disgr�ce commune et n'alla pourtant pas souhaiter la f�te � sa m�re; cette fois ce fut bien malgr� lui. Il eut une fi�vre scarlatine assez violente, durant laquelle il para�t qu'il s'affecta beaucoup de la disparition du jeune Octave de S�gur, qu'il aimait particuli�rement. Cette histoire est myst�rieuse et romanesque. Octave �tait sous-pr�fet � Soissons, il vint passer quelques jours � Paris, en repartit un matin et resta plusieurs ann�es sans qu'on entend�t parler de lui. Plus {Lub 475} tard il se br�la la cervelle. Un amour malheureux fut la cause de cette fuite et de ce suicide. Mon p�re a fait sur son absence une romance tr�s-remarquable comme musique, et dont les paroles commencent ainsi:


Octave, de te retrouver
Ne reste-t-il plus d'esp�rance?

C'est le seul morceau de musique qui me soit rest� de lui. Son op�ra d'Éliz�ne, qui l'avait tant occup� et tant passionn�, a disparu jusqu'au dernier feuillet; mais la romance dont je parle me prouve qu'il avait de v�ritables id�es musicales.

Pendant y la maladie de Maurice, Ren� �crivait z � ma grand'm�re pour la rassurer, et il lui �chappait quelques indiscr�tions involontaires sur ma naissance, dont il la croyait inform�e. Il n'est point question du mariage dans ces lettres; je ne pense pas qu'il en e�t re�u la confidence, mais il attribue � la pers�v�rance de l'attachement de Maurice pour Sophie le peu de succ�s de ses d�marches pour son avancement. Cela ne me para�t pas prouv�, car mon p�re �tait compris dans une mesure de disgr�ce g�n�rale concernant les �tats-majors. S'il est vrai qu'il e�t pu {CL 86} faire faire une exception en sa faveur, � force d'obsessions et de d�marches, je ne lui en veux pas d'avoir �t� inhabile � ce genre de succ�s. Mais ma grand'm�re, effray�e et irrit�e des insinuations que le plus tendre int�r�t dictait � M. de Villeneuve, �crivit une lettre assez am�re � son fils, ce qui lui donna un nouvel acc�s de fi�vre. Sa r�ponse est pleine de tendresse et de douleur.

LETTRE III

10 fructidor (ao�t 1804).

Je suis, dis-tu, ma bonne m�re, un ingrat et un fou. Ingrat, jamais! fou, je le deviendrai peut-�tre, malade de corps et d'esprit comme me voil�. Ta lettre me fait beaucoup plus de mal que la r�ponse du ministre, car tu m'accuses de mon propre guignon, et tu voudrais que j'eusse fait des miracles pour le conjurer. Je n'en sais point faire en fait de courbettes et d'intrigues. Ne t'en prends qu'� toi-m�me qui de bonne heure m'as enseign� {Lub 476} � m�priser les courtisans. Si tu ne vivais pas depuis quelques ann�es loin de Paris et retir�e du monde, tu saurais que le nouveau r�gime est sous ce rapport pire que l'ancien, et tu ne me ferais pas un crime d'�tre rest� moi-m�me. Si l'on avait fait la guerre plus longtemps, je crois que j'aurais conquis mes grades, mais depuis qu'il faut les conqu�rir dans les antichambres, j'avoue que je n'ai pas sous ce rapport-l� de brillantes campagnes � faire valoir. Tu me reproches de ne te jamais parler de mon int�rieur. C'est toi qui ne l'as jamais voulu ! Est-ce possible quand, au premier mot, tu m'accuses d'�tre un mauvais fils? Je suis forc� de me taire, car je n'ai � te faire qu'une r�ponse dont tu ne te contentes pas, c'est que je t'aime et que je n'aime personne {CL 87} plus que toi. — N'est-ce pas toi qui as �t� toujours contraire � mon d�sir de quitter Dupont et de rentrer dans la ligne? A pr�sent tu reconnais que je suis dans un cul-de-sac; mais il est trop tard. Il faut maintenant obtenir cela comme une faveur sp�ciale de Sa Majest�. La faveur et moi ne faisons gu�re route ensemble. aa Tu dis qu'on m'a desservi, c'est possible, mais je ne sais pas qui Je ne me connais pas d'ennem�s, et si j'en ai, ce n'est pas ma faute. Voil� ce que ma conscience peut jurer devant Dieu et devant toi.

Au milieu de tout cela, on ne retrouve point Octave. Il est certain maintenant qu'on l'a assassin�, mais aucun indice! Son p�re est au d�sespoir, et moi dans un chagrin affreux. Cest bien l� pour une famille un autre malheur qu'une disgr�ce de cour! On dit que, pour accepter son sort, il faut toujours regarder au-dessous de soi. C'est une vilaine maxime, et qui semble nous dire que notre consolation est dans la d�solation des autres!

Il ab retourna � Nohant et y passa encore six semaines sans que le fatal aveu p�t passer de son cœur � ses l�vres: mais son secret fut devin�, car vers la fin de brumaire an XIII (novembre 1804), en m�me temps qu'il revenait � Paris, sa m�re �crivait au maire du cinqui�me arrondissement:

« Une m�re, monsieur, n'aura pas sans doute besoin de justifier aupr�s de vous le titre avec lequel elle se pr�sente pour solliciter votre attention.

{Lub 477} J'ai de fortes raisons pour craindre que mon fils unique ne se soit r�cemment mari� � Paris sans mon consentement. Je suis veuve; il a vingt-six ans; il sert, il s'appelle Maurice-Fran�ois-Elisabeth Dupin. La personne avec laquelle il a pu contracter mariage a port� diff�rents noms, celui que je crois le sien est Victoire Delaborde. {CL 88} Elle doit �tre un peu plus �g�e que mon fils, tous deux demeurent ensemble rue Meslay, n° 15 ac, chez le sieur Mar�chal*, et c'est parce que je suppose cette rue dans votre arrondissement que je prends la libert� de vous adresser mes questions et de vous confier mes craintes. J'ose esp�rer que vous voudrez ad bien faire parvenir ma lettre � celui de MM. vos coll�gues dans l'arrondissement duquel se trouve la rue Meslay.

Cette fille ou cette femme ae, car je ne sais de quel nom l'appeler, avant de s'�tablir dans la rue Meslay, demeurait en niv�se dernier rue de la Monnaie, o� elle tenait une boutique de modes.

Depuis qu'elle habite la rue Meslay, mon fils en a eu une fille que je crois n�e en messidor et inscrite sur les registres sous le nom d'Aurore, fille de M. Dupin et de... L'inscription pourrait, ce me semble, vous donner quelque lumi�re sur le mariage, s'il existe pr�c�demment, comme je le crois, � cause du pr�nom qu'on a donn� � l'enfant. Quelques indices me font pr�sumer qu'il peut avoir �t� contract� en prairial dernier. J'ai l'honneur d'�crire � un magistrat, peut-�tre � un p�re de famille, ce double titre ne m'aura pas vainement flatt�e d'une r�ponse aussi prompte que possible et d'une discr�tion inviolable, quel que soit le r�sultat des recherches que je prends la libert� de vous demander.

J'ai l'honneur, etc.

DUPIN.

* Mon oncle. Il venait d'�pouser ma tante Lucie. 1

{Presse 19/11/54 1} SECONDE LETTRE DE MADAME DUPIN
AU MAIRE DU CINQUIÈME ARRONDISSEMENT. af

En confirmant mes craintes, monsieur, vous avez navr� mon cœur, et de longtemps il ne s'ouvrira aux consolations {CL 89} que vous voulez y r�pandre: mais il ne sera {Lub 478} jamais ferm� � la reconnaissance, et je sens tout le prix d'une intention qui honore le v�tre. Cependant je dois trop � vos soins g�n�reux pour ne pas en esp�rer encore quelque chose. Vous paraissez croire que la plus grande irr�gularit� commise dans ce mariage fut d'avoir bless� les sentiments les plus respectables et les plus doux. Je vois que vous les connaissez; mais vous ne connaissez pas, et puissiez-vous ne jamais conna�tre jusqu'� quel point il peut les avoir bless�s! Je l'ignore encore moi-m�me; mais mon cœur me dit qu'il faut qu'il soit bien coupable, puisqu'il a cru devoir me faire un myst�re de la d�marche la plus essentielle de sa vie. C'est ce myst�re que vous seul pouvez m'aider � approfondir, parce que vous seul en �tes jusqu'ici le d�positaire, parce que je n'ose confier � aucune personne de ma connaissance � Paris ce que mon fils n'a pas os� dire � sa m�re, parce que j'ose encore moins, pendant qu'il y est, m'y rendre moi-m�me et quitter une terre que je me plaisais � embellir pour une compagne digne de lui et de moi. Et cependant il faut bien que je sache quelle est cette �trange belle-fille qu'il a voulu me donner!...

Ma tranquillit� pr�sente, son bien-�tre futur en d�pendent. Pour que mon cœur se familiarise, s'il le faut, avec toutes les cons�quences de sa faute, il est absolument n�cessaire que mon esprit l'embrasse dans tous ses d�tails. Votre estimable coll�gue le maire du... arrondissement a bien voulu vous offrir communication du dossier qui forme la r�union des pi�ces produites par les deux �poux. Il ne vous refusera pas, monsieur, une copie r�guli�re de toutes ces pi�ces sans exception: et j'ose attendre de votre obligeance, j'aurais d� dire de votre sensibilit�, que vous voudrez bien la lui demander, soit eu votre nom, soit au mien.
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

{CL 90} Il est facile de voir par cette lettre si douloureuse, si g�n�reuse, et pourtant si habile, que ma grand'm�re d�sirait consulter pi�ces en main, afin de faire d�clarer, s'il �tait possible, la nullit� du mariage. Elle n'ignorait pas autant qu'elle voulait bien le dire ag les noms et pr�c�dents de sa belle-fille; elle feignait de tout ignorer pour ne pas laisser p�n�trer ses desseins, et si elle faisait pressentir une sorte de pardon qu'elle n'�tait encore nullement {Lub 479} dispos�e � accorder, c'�tait dans la crainte de trouver dans le maire du... arrondissement (celui qui avait fait le mariage) un auxiliaire complaisant de ce mariage irr�guli�rement contract�. Aussi ne s'adressait-elle pas � lui directement, mais bien au maire du cinqui�me, qu'elle savait ne point avoir la rue Meslay dans sa juridiction, et sur l'int�grit� duquel probablement elle avait quelques donn�es particuli�res. La ruse d�licate de la femme l'inspirait donc mieux que n'e�t pu le faire un habile conseil, et j'avoue que cette petite conspiration contre la l�gitimit� de ma naissance me para�t d'une l�gitimit� tout aussi incontestable.

De son c�t�, mon p�re, conseill� probablement par un homme sp�cial, car de lui-m�me il f�t tomb� dans tous les pi�ges de la tendresse maternelle, devait vouloir cacher son mariage jusqu'au moment o� tout d�lai d'opposition de la part de sa m�re serait expir�. Ils se trompaient donc l'un l'autre, triste fatalit� de leur mutuelle situation, et ils s'�crivaient comme si de rien n'�tait. Je dis qu'ils se trompaient, et pourtant ils n'�changeaient pas de mensonges. Le seul artifice, c'�tait le silence que tous deux gardaient dans leurs lettres sur le principal objet de leurs pr�occupations.


Variantes

  1. Le deuxi�me partie est soud�e � la premi�re dans {Presse}. Les titres des parties ne figurent qu'� partir de l'�dition {CL}.
  2. Histoire de ma vie. 2de partie. 4me volume. Sommaire du Ier chapitre {Ms}CHAPITRE VINGTIÈME {Presse} ♦ CHAPITRE HUITIÈME {Lecou}, {LP} ♦ VIII {CL}
  3. Mon signalement [Un acte de notori�t� ray�] {Ms}
  4. D�chirements de cœur {Ms}, {Presse} ♦ D�chirement de cœur {Lecou} et sq.
  5. Les deux premiers paragraphes sont, dans {Ms} �crits � l'encre bleue, ce qui t�moigne d'une redaction post�rieure � 1850.
  6. r�volution [de 1848 ray�] {Ms}
  7. loisir [sans <mot illisible> avec la politique que je ne connaissais gu�res et que je n'avais point dessein de conna�tre ray�] {Ms}
  8. conserv�es [sous mes cheveux qui grisonnent ray� bleu] {Ms}
  9. de l'humanit�. [Je ne le suis point encore, bien gue j'aie souffert, plus que lui. Si je le deviens, mes semblables me pardonneront, quoique je ne puisse me plaindre aussi �loquemment que lui, mais parce que j'aurai souffert plus longtems avant de me plaindre, dans cet �ge o� la plainte a plus de port�e et de danger que dans l'exhub�rance [sic] des jeunes ann�es ray� bleu] {Ms} (Les deux phrases qui suivent sont rajout�es � l'encre bleue.)
  10. de Rousseau {Ms}, {Presse}, {Lecou}, {LP} ♦ de Jean-Jacques Rousseau {CL}
  11. je vins donc au monde {Ms}, {Presse}, {Lecou}, {LP} ♦ je vins au monde {CL}
  12. aussi [je ne dis pas au point de vue de l'h�ritage, peu m'importe, mais au point de vue de l'�ducation ray� bleu] {Ms}
  13. peut-�tre pas [m�l�e de leur m�nage ray� bleu] occup�e de moi (add. bleu) {Ms}
  14. ce beau soleil {Ms}, {Presse} ♦ ce bon soleil {Lecou} et sq.
  15. attire [d'autant plus ray� bleu] irr�sistiblement [que vous avez plus veill� au froid de la nuit, ne pas toucher la main d'une ling�re, votre camarade, dans la crainte de gagner des verrues ray� bleu] {Ms}
  16. d�bilit� [de l'organe qui physiquement distingue le plus l'homme de la brute ray� bleu] {Ms}
  17. soit vrai, [En outre j'ai h�rit� d'un tic, que ma m�re avait et que je n'ai jamais perdu, c'est de me ronger l'int�rieur des l�vres, ce qui n'avait pourtant pas r�ussi � enlaidir ma m�re, mais ce qui m'a enlaidie beaucoup ray� bleu] {Ms}
  18. dans [mon enfance ray�] ma jeunesse {Ms}
  19. qui portait mon nom {Presse}, {Lecou}, {LP} ♦ qui porte mon nom {CL}
  20. Depuis Mais justement � ce propos il y a dans {Ms} une lacune d'une page, qui cesse ici.
  21. pendant une [dizaine ray�] quinzaine d'ann�es {Ms}
  22. habitude [d'insouciance ray�] de paresse {Ms}
  23. À partir d'ici longue lacune de 11 pages dans {Ms}
  24. Interruption de {Presse}
  25. Le manuscrit se retrouve ici
  26. Pendant [...] �crivait {Ms}Reprise de {Presse} avec une phrase de raccord: Mon p�re eut a cette �poque une fi�vre scarlatine pendant laquelle Ren� �crivait{Lecou} et sq. comme {Ms}
  27. Interruption de {Presse}
  28. Reprise de {Presse}
  29. rue Mesl�e n° 15 {Ms}rue Meslay n° 15 {Presse}
  30. que vous voudriez {Ms}que vous voudrez {Presse} {CL} que vous voudriez {Lub} (r�tablissant la 1�re le�on, conforme � l'original dde la lettre; nous respectons la le�on des �ditions ant�rieures)
  31. Cette fille ou femme {Ms}, {Presse}, {Lecou}, {LP} ♦ Cette fille ou cette femme {CL} Cette fille ou femme {Lub} (r�tablissant la 1�re le�on; nous le suivons)
  32. Deuxi�me lettre [...] au maire du 5e arrondissement. {Presse}
  33. À partir d'ici nouvelle et tr�s longue interruption de {Ms}

Notes

  1. {Presse}: (La suite � demain.)