Le paradoxe des caisses automatiques : remplacer les humains, mais à quel prix ?

Il y a quelque chose d’étrangement ironique à propos des caisses automatiques. Elles sont censées incarner l’efficacité, la rapidité, et, pourquoi pas, un brin de modernité dans le paysage des supermarchés. Pourtant, je me demande souvent si nous ne sommes pas tous victimes d’une sorte de mirage technologique. “Automatique”, vraiment ? C’est peut-être là le plus grand paradoxe.

Plus lent qu’une caisse traditionnelle ? Qui l’aurait cru !

Lorsque vous faites la queue devant une caisse traditionnelle, vous vous attendez à une certaine fluidité. Vous placez vos articles sur le tapis roulant, l’hôtesse (ou hôte) de caisse scanne, vous payez, et c’est terminé. Simple et rapide. En revanche, devant une caisse automatique, c’est une autre histoire : on vous demande d’endosser le rôle du caissier, avec tout ce que cela implique. Vous scannez vous-même vos articles, en prenant soin de les positionner correctement pour éviter l’irritant bip bip de l’erreur de pesée, sans parler des produits qui nécessitent une validation humaine (on y reviendra). Ajoutez à cela le temps passé à chercher le code-barres, à placer vos articles dans des sacs qu’il faut peser avant chaque validation…

Et si vous avez des fruits ou légumes à peser ? Ah ! Là, on entre dans une véritable chasse au trésor. Il vous faudra naviguer à travers une longue liste de variétés de pommes ou de tomates jusqu’à trouver celle que vous avez en main. Une tâche qu’un professionnel aurait expédiée en deux secondes.

Au final, ces caisses dites “automatiques” sont-elles vraiment plus rapides ? J’en doute sérieusement. Plus d’une fois, j’ai vu des clients se débattre avec ces machines, tandis que d’autres passent tranquillement à la caisse traditionnelle, emmenés par des hôtesses expérimentées et, surtout, bien plus rapides.

Une automatisation sans automatisme

Il est amusant de constater que, malgré leur promesse d’automatisation, ces caisses exigent souvent l’intervention humaine. Entre la vérification d’âge pour l’achat d’alcool, les erreurs de pesée, ou encore les petits incidents d’articles non reconnus, il y a toujours un employé en faction, prêt à intervenir. Alors pourquoi continuer à parler d’automatisation si, au final, un humain est nécessaire pour que le tout fonctionne ?

De fait, ces caisses sont une forme déguisée de self-service : on nous demande de travailler à la place des caissières, sous prétexte de rapidité et de commodité. Mais soyons honnêtes : scanner, ensacher, et payer sont des tâches que nous ne maîtrisons pas forcément mieux qu’un professionnel. Résultat, on perd du temps et on se stresse inutilement. C’est un peu comme si, au restaurant, on vous demandait de cuisiner vous-même votre repas sous prétexte que ça irait plus vite !

Une révolution qui met à mal le lien humain

Au-delà de l’inefficacité pratique, il y a un autre problème sous-jacent, bien plus inquiétant. Ces machines, aussi impersonnelles soient-elles, contribuent à la disparition progressive des caissières et caissiers, qui, rappelons-le, sont des êtres humains. Derrière chaque caisse automatique installée, c’est un emploi en moins. Ces personnes qui, pendant des années, nous ont souri, échangé quelques mots avec nous, et qui, parfois, par leur simple présence, adoucissaient la corvée des courses, sont remplacées par des machines froides et sans âme.

Pire encore, cela place les employés restants dans une position ingrate : ils deviennent des superviseurs de robots, passant leur temps à corriger les erreurs des clients qui se battent avec ces appareils. Où est l’amélioration des conditions de travail dans tout ça ?

L’illusion du progrès

Il est frappant de constater à quel point ces caisses automatiques illustrent l’illusion du progrès technologique. Nous sommes censés accepter que les machines fassent mieux que les humains, mais ici, c’est tout le contraire. Elles ne sont ni plus rapides, ni plus efficaces, et elles déshumanisent un peu plus nos interactions quotidiennes. Alors, quel est l’intérêt ?

Certainement pas pour les clients, qui se retrouvent à jouer au caissier amateur. Pas non plus pour les employés, dont les métiers sont menacés par une automatisation imparfaite. Finalement, ces caisses semblent surtout bénéficier aux entreprises elles-mêmes, qui voient une opportunité de réduire les coûts salariaux.

Et nous dans tout ça ?

Si nous nous résignons à cette fausse automatisation, c’est sans doute parce que nous pensons y gagner en autonomie et en rapidité. Mais cette illusion ne doit pas nous aveugler. Au lieu de faire gagner du temps, les caisses automatiques nous en volent un peu plus. Au lieu d’améliorer l’expérience client, elles la compliquent. Au lieu de servir le progrès, elles l’entravent.

Alors la prochaine fois que vous ferez face à ces caisses automatiques, posez-vous la question : est-ce vraiment cela, l’avenir du commerce ? Un avenir où l’on travaille gratuitement pour une machine lente et défectueuse, au détriment de notre propre confort et de la dignité des employés de caisse ? N’est-il pas temps de revoir notre idée du progrès ?

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