« Avoirs russes » gelés par l’UE : arme de guerre ou mirage médiatique ?

Depuis l’invasion russe en Ukraine en février 2022, les « avoirs russes » sont sur toutes les lèvres. Gelés par l’Union européenne (UE) dans une vague de sanctions, ces actifs sont brandis comme une arme économique contre Moscou, voire une cagnotte pour financer l’effort ukrainien. Mais de quoi parle-t-on vraiment ? S’agit-il d’un levier de coercition efficace ou d’un narratif politico-médiatique bien ficelé ? Décryptage d’un dossier complexe, entre promesses ambitieuses et risques sous-estimés.

Que sont ces « avoirs russes » ?

Les « avoirs russes » désignent les actifs financiers et économiques russes bloqués par l’UE depuis 2014, avec une accélération massive en 2022. Ils se divisent en deux catégories :

  1. Les avoirs de la Banque centrale russe (BCR) : Réserves de change (devises, obligations, dépôts) détenues à l’étranger, notamment chez Euroclear en Belgique. Dans l’UE, ils pèsent environ 210 milliards d’euros, sur un total mondial de 300 milliards gelés par le G7.
  2. Les avoirs privés : Comptes bancaires, propriétés, yachts ou parts dans des entreprises, appartenant à des oligarques ou entités liées au Kremlin. Leur valeur dans l’UE atteint 24,9 milliards d’euros, selon le Conseil européen, un chiffre probablement sous-estimé.

Au total, près de 235 milliards d’euros sont immobilisés, auxquels s’ajoutent des intérêts annuels de 2,5 à 3 milliards d’euros. “Gelé” ne veut pas dire “confisqué” : ces fonds restent russes, mais inutilisables – pour l’instant.

Un gel en place, une confiscation en débat

Le gel est effectif depuis février 2022, visant à priver Moscou de ressources pour sa guerre. Mais il est fragile : renouvelé tous les six mois à l’unanimité des 27, il pourrait vaciller si un pays comme la Hongrie bloque le processus. Juridiquement, il tient sur un fil, entre l’immunité souveraine des avoirs étatiques et la nécessité de preuves pour les avoirs privés.

La confiscation, elle, fait saliver. Ursula von der Leyen rêve d’utiliser ces fonds pour compenser les 600 milliards d’euros de dommages en Ukraine. L’UE a déjà affecté les intérêts – 1,5 milliard d’euros en juillet 2024, 3 milliards en janvier 2025 – à des armes et à la reconstruction. Mais saisir le capital ? Impensable pour certains : cela violerait le droit international et déclencherait des représailles russes, judiciaires et économiques.

Leçons du passé : une efficacité douteuse

Les précédents historiques tempèrent les ardeurs. L’Iran a vu 100 milliards de dollars gelés après 1979 : Téhéran a survécu en tissant des alliances avec la Chine et la Russie. La Libye de Kadhafi a perdu 150 milliards dans les années 2000 : l’économie a souffert, mais le régime a tenu bon grâce à des contournements. Ces cas montrent que geler des avoirs gêne, mais ne brise pas un adversaire résilient – un miroir peu flatteur pour l’UE face à une Russie qui s’adapte via la Chine, l’or et des alternatives à SWIFT.

Un boomerang pour l’économie européenne ?

Confisquer ces 235 milliards d’euros serait un coup de poker risqué. La Russie riposterait en saisissant les 288 milliards de dollars d’actifs occidentaux sur son sol – usines Renault, filiales TotalEnergies, investissements allemands. Les entreprises européennes, déjà fragilisées par la perte du marché russe (exportations en chute de 60 % depuis 2022), encaisseraient un nouveau choc. Les banques, comme celles exposées via Euroclear, trembleraient : une confiscation pourrait déclencher une vague de retraits et une crise de liquidité, l’euro représentant 20 % des réserves mondiales contre 60 % pour le dollar.

Un ordre financier mondial en péril

À plus long terme, l’UE joue avec le feu. Une confiscation écornerait la confiance dans le système bancaire occidental. La Chine, qui dope son commerce avec Moscou (240 milliards de dollars en 2023) et porte le yuan à 4 % des réserves mondiales, y verrait une aubaine pour accélérer la dédollarisation. Les pays du Golfe, entre neutralité (OPEP+ avec la Russie) et prudence (investissements en Europe), pourraient aussi diversifier leurs avoirs, délaissant l’euro. Si l’UE persiste, elle risque de torpiller sa propre devise et de céder du terrain dans un ordre financier qu’elle domine encore – pour combien de temps ?

Coercition ou narratif ? Un pari risqué

Le gel pèse sur Moscou, mais la Russie s’adapte – Chine, alternatives à SWIFT, réserves en or. La confiscation, elle, reste un mirage, trop explosive pour être viable. Derrière le récit d’une Europe qui punit Poutine avec son propre argent, c’est un bras de fer incertain qui se joue, où les gains sont douteux et les pertes certaines. L’UE veut faire plier la Russie avec ces mesures, mais risque surtout d’apprendre à quel point la finance mondiale est une arme à double tranchant – dont la lame pourrait bien se retourner contre elle. Comme l’écrivait Alexandre Soljenitsyne dans L’Archipel du Goulag, que « l’univers a autant de centres qu’il y a d’êtres vivants en lui » – et que prétendre dominer ce jeu mondial pourrait bien la ramener à sa propre fragilité.


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